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Université Laval Faculté des sciences de l'éducation
Clinique de psychoéducation de l'Université Laval (CPUL)

Exposition des enfants à la violence conjugale : comprendre pour mieux intervenir

11 mars 2024

Et si c’était plus qu’une chicane?

Dans un contexte de violence conjugale, les enfants exposés peuvent réagir de diverses façons et il peut parfois être difficile pour les intervenantes et intervenants de savoir comment agir et intervenir. Le présent article porte sur la problématique de la violence conjugale et ses impacts sur les enfants, et propose des moyens concrets pour accompagner cette clientèle.

Comment reconnaitre une ou un enfant exposé à la violence conjugale?

Une ou un enfant est dit exposé à la violence conjugale lorsqu’elle ou il est témoin ou a connaissance des comportements liés aux diverses formes de violence conjugale (verbale, physique, psychologique, sexuelle, économique) entre ses parents. L’exposition de l’enfant peut se faire directement (l’enfant voit les comportements violents) ou indirectement (l’enfant vit dans un climat tendu et instable en raison de la présence de violence). De plus, l’exposition peut avoir lieu pendant la relation entre les parents ou à la suite de la rupture entre les deux (violence post-séparation). En 2018, au Québec, environ une ou un enfant sur 10 a été exposé à au moins un épisode de violence conjugale.

Une ou un enfant exposé peut vivre la violence conjugale de quatre façons :

Vivre avec le secret. L’enfant ne veut pas être responsable de l’éclatement de la famille ou des conséquences liées au fait d’en parler à quelqu’un d’autre, donc elle ou il se tait par rapport à la situation vécue.

Vivre un conflit de loyauté. L’enfant vit simultanément des sentiments contradictoires d’amour et de haine envers ses parents. Afin de se sortir de cette ambivalence, l’enfant peut décider de prendre le parti de l’un ou l’autre de ses parents ou de s’isoler socialement.

Vivre dans la crainte et la peur. L’enfant peut croire que la violence et le climat tendu dans lequel elle ou il vit sont « normaux ». Elle ou il peut devenir méfiant envers les autres ou encore développer une hypervigilance et un sentiment d’impuissance.

Vivre dans un contexte de domination et d’agressivité. L’enfant intériorise le rapport hiérarchique entre ses parents et peut être tenté de reproduire les comportements qu’elle ou il a observés dans ses autres relations interpersonnelles, soit en adoptant une posture d’agresseur ou de victime.

L’exposition de l’enfant peut se faire directement (l’enfant voit les comportements violents) ou indirectement (l’enfant vit dans un climat tendu et instable en raison de la présence de violence).

Les conséquences de la violence conjugale chez une ou un enfant exposé peuvent varier entre autres selon les caractéristiques de l’enfant, de l’environnement et de la dynamique de la violence. Il est possible que l’enfant vive des conséquences physiques, comme des blessures ou des problèmes de santé reliés au stress, ou qu’elle ou il vive des conséquences psychologiques à la suite de l’exposition à la violence conjugale, comme les difficultés de langage et d’apprentissage ou des comportements agressifs et destructeurs.

Certains facteurs présents chez l’enfant peuvent diminuer l’ampleur des conséquences de la violence. Par exemple, la présence d’une estime de soi élevée, d’un réseau social soutenant et de compétences sociales adéquates peut favoriser la résilience chez l’enfant. À l’inverse, la présence de certains facteurs peut amplifier les conséquences vécues par l’enfant. L’âge est un facteur important, particulièrement pour les enfants entre 0 et 4 ans qui sont plus vulnérables en raison de leur dépendance aux soins des parents. Certains traits de l’enfant comme l’anxiété ou l’introversion peuvent également la ou le rendre plus vulnérable en contexte de violence conjugale.

Comment intervenir auprès de ces enfants?

Les enfants exposés à la violence conjugale sont fragilisés par ce qu’elles ou ils vivent. Il faut donc faire preuve de patience et de bienveillance pour les aider à cheminer. Les interventions doivent principalement miser sur les compétences de l’enfant et favoriser son estime personnelle, tout en tenant compte de sa compréhension de la violence. En intervenant auprès de ces enfants, il est important de garder en tête ces quatre objectifs :

  1. Permettre aux enfants de discuter ouvertement et franchement de leur vécu de violence et les écouter en restant le plus neutre possible.
  2. Aider les enfants à identifier et gérer les émotions qu’elles ou ils vivent en lien avec la violence.
  3. Mettre en place diverses stratégies afin de viser la réduction des symptômes vécus par l’enfant.
  4. Soutenir la famille afin de rétablir un environnement sécuritaire et stable pour tous les membres.

Il faut garder en tête que l’enfant a le droit de continuer d’aimer ses deux parents malgré la violence. Il est possible de dénoncer les comportements violents tout en évitant de « démoniser » le parent agresseur, ce qui risque plutôt d’amplifier les sentiments contradictoires de l’enfant. 

La présence d’une estime de soi élevée, d’un réseau social soutenant et de compétences sociales adéquates peut favoriser la résilience chez l’enfant. 

Gardons en tête que les enfants peuvent être exposés à diverses formes de violence conjugale et que les réactions et les conséquences de cette exposition varient d’un enfant à l’autre. Dans l’accompagnement de cette clientèle, l’important est d’être bienveillant et à l’écoute de leurs besoins.

Pour avoir plus d’informations sur les conséquences de la violence conjugale chez les enfants et sur les moyens de les aider, il est possible de communiquer avec les ressources suivantes :

Article rédigé par Gabrielle Gaulin, étudiante à la maîtrise en psychoéducation.

Références

Cotton, A. et Rochette, É. (2015). Comité de travail pour une action concertée auprès des enfants exposés à la violence conjugale et leur famille : état des lieux et recommandations. Ministère de la santé et des services sociaux. https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/2449641  

Latour, G. L. (2019). Intervenir auprès des enfants exposés à la violence conjugale : l’exemple de Carrefour pour femmes. Reflets, 25 (2), 159–165. https://doi.org/10.7202/1067051ar

Laforest, J., Maurice, P. et Bouchard, L.-M. (2018). Rapport québécois sur la violence et la santé. Institut national de santé publique du Québec. https://www.inspq.qc.ca/view-ebook/12184

Lévesque, S., Clément, M.-E. et Julien, D. (2019). La violence familiale dans la vie des enfants du Québec, 2018. Les attitudes parentales et les pratiques familiales. Institut de la statistique du Québec. https://statistique.quebec.ca/fr/fichier/la-violence-familiale-dans-la-vie-des-enfants-du-quebec-2018-les-attitudes-parentales-et-les-pratiques-familiales.pdf

Ouimette, J. (2011). Guide d’intervention auprès des enfants, des adolescentes et adolescents exposés à la violence faite aux femmes. Action ontarienne contre la   violence faite aux femmes. https://www.tcvcm.ca/files/2015-12/protege.pdf

Paradis, L. (2012). L’enfant exposé à la violence conjugale. Son vécu, notre rôle. Direction régionale de santé publique de la Capitale-Nationale. https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/2159925

SOS violence conjugale. (s.d.). Les enfants : témoins et victimes de la violence conjugale. https://sosviolenceconjugale.ca/fr/articles/les-enfants-temoins-et-victimes-de-la-violence-conjugale